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La copropriété dans le Code civil chinois

La copropriété dans le Code civil chinois :

entre continuation et innovation

LI Bei

Professeur à l’Université Jiao-Tong de Shanghai

 

La copropriété se réfère à la propriété répartie par lots entre plusieurs occupants d'un immeuble de grande hauteur ou à étages. Contrairement à la forme typique de la copropriété, la copropriété des immeubles se caractérise non seulement par une forme de droit de propriété collectif dont jouissent les parties sur les parties communes et par leur droit de propriété individuel sur les parties privatives, mais aussi par le fait que ces deux droits ne sont pas entièrement séparables, mais interdépendants et interactifs, susceptibles à ce titre de délimiter les droits de l'un et de l'autre. L’attribut à la fois collectif et individuel de la copropriété rend complexe son organisation sur le plan institutionnel. 

Certes la copropriété est une notion venue de l’étranger dont la première apparition remonte à la réglementation de 1989 adopté par le Ministère de la construction. Étant donné que les citadins chinois d'aujourd'hui vivent principalement dans des bâtiments de grande hauteur, la copropriété est peut-être beaucoup plus répandue et influente dans la vie sociale en Chine que dans la plupart des pays développés d'Europe et d'Amérique. C'est peut-être pour cette raison que, contrairement au droit français, qui définit le statut juridique de la copropriété par une loi spécifique, la Chine a décidé de consacrer un chapitre sur la copropriété lors de l'élaboration de sa Loi sur les droits réels en 2007. Comme le Code civil garde les dispositions prises par la Loi sur les droits réels en la matière, la copropriété continue à occuper une place dans la loi fondamentale civile en Chine.

L’élaboration du Code civil actuel repose sur le principe de la continuité comme l’axe principal et de l’innovation en second lieu, la majeure partie du Code civil reprend les dispositions pertinentes des lois sectorielles ou des interprétations judiciaires précédentes afin de maintenir la continuité du système juridique, seuls certains anachronismes ou problèmes majeurs rencontrés dans la pratique ont été corrigés, et certaines lacunes juridiques comblées, tandis que certaines innovations institutionnelles ont été apportées pour tenir compte de l'évolution de l'époque et de la société. Ces deux aspects que sont la continuité et l'innovation se reflètent simultanément dans les dispositions du Code civil concernant la copropriété.

 

1. La continuité dans le Code civil

En général, les dispositions du Code civil relatives à la copropriété suivent en gros celles de la Loi sur les droits réels de 2007 et les interprétations judiciaires correspondantes. Tout d'abord, l'article 271 du Code civil suit exactement l'article 70 de la Loi sur les droits réels concernant la définition de l'étendue de la copropriété : « Un propriétaire détient la propriété des parties privatives des bâtiments, telles que les maisons d'habitation ou les maisons à usage commercial, et la propriété commune et le droit de gestion commune des parties communes autres que les parties privatives. » Cette disposition clarifie les droits des propriétaires sur les parties privatives et leur droit à la propriété et à la cogestion des parties communes. En outre, le Code civil maintient les dispositions précédentes en ce qui concerne les droits des propriétaires sur les parties privatives et communes. Un propriétaire possède le droit d’occuper, d'utiliser, de jouir et de disposer de ses parties privatives à condition que l'exercice de ces droits ne doit pas se faire de manière à mettre en danger la sécurité de l'immeuble, d'une part, ou au détriment des droits et intérêts légitimes des autres propriétaires, d'autre part. Par exemple, l'installation par les propriétaires d'une caméra de surveillance dans les couloirs et à l'intérieur des parties privatives est généralement considérée par les tribunaux comme une atteinte au droit à la vie privée des autres propriétaires. En ce qui concerne les parties communes, la loi prévoit notamment qu’un propriétaire ne peut invoquer la renonciation à ses droits pour ne pas remplir ses obligations en la matière. Enfin, le Code civil reprend également dans les grandes lignes les dispositions de la Loi sur les droits réels en ce qui concerne l'attribution des routes, des espaces verts, des garages…, les restrictions sur la conversion des logements par les propriétaires en bâtiments à usage commercial ou l’assemblée des propriétaires, la révocation des décisions prises par des comités de propriétaires.

 

2. Les innovations dans le Code civil

Les principaux changements introduits par le Code civil en matière de copropriété touchent les éléments suivants :    

Le premier changement, et le plus important, concerne le nombre de votes requis lors d'une assemblée des propriétaires ou d'un comité des propriétaires. En droit chinois, en fonction de l'importance des matières décidées conjointement par les propriétaires, la loi distingue les matières dites de résolution générale et les matières de résolution spéciale, et en fixe le quorum requis correspondant. Les dispositions de la Loi sur les droits réels antérieures au Code civil exigeaient un double quorum des deux tiers en matière de résolution spéciale, c’est-à-dire votée par les propriétaires dont les parties privatives occupe plus des deux tiers de la superficie totale du bâtiment et qui représentent plus des deux tiers du nombre total de propriétaires, tandis que le double quorum de la moitié était appliqué en matière de résolution générale. Mais cette règle a rencontré une résistance considérable dans la pratique. Comme les comités de propriétaires sont une chose toute nouvelle en Chine, la plupart des propriétaires ne sont pas assez enthousiastes pour participer à la prise de décisions, ce qui a souvent pour conséquence que les résolutions du comité ne peuvent pas être adoptées en raison de l'impossibilité de réunir le nombre de personnes requis par la loi, notamment en ce qui concerne les décisions portant sur des questions importantes. Face à la faible volonté des propriétaires de voter, le Code civil a cette fois-ci modifié la manière dont les décisions des assemblées de propriétaires sont votées. Plus précisément, l'article 278, paragraphe 2, du Code civil distingue entre le seuil de participants requis pour un vote et le seuil de participants requis pour l'adoption d'une résolution. Premièrement, pour qu'une résolution soit valide, la loi exige la participation des propriétaires qui représentent au moins deux tiers de la superficie des parties privatives et au moins deux tiers du nombre total de propriétaires. En d'autres termes, si le nombre de participants ne répond pas à la double exigence légale des deux tiers, la résolution ne sera pas valide. En second lieu, sous réserve du nombre requis des participants, la loi prévoit en outre le nombre de personnes requis pour adopter des résolutions en matières spéciales et générales, pour les premières les doubles trois-quarts et les secondes, la double moitié. Il est à noter que, contrairement aux dispositions précédentes de la Loi sur les droits réels, c'est le nombre de propriétaires participants et la superficie totale des parties privatives qu'ils occupent, et non le nombre total de propriétaires et la superficie totale de l'immeuble, qui servent ici de base de calcul. Il en résulte qu'en théorie, le consentement de la moitié des propriétaires est suffisant pour faire passer un vote sur une question d'importance particulière, et cette nouvelle disposition a effectivement pour effet d'abaisser le quorum requis.

 Le deuxième changement, relativement important, concerne l'activation de fonds d’entretien des bâtiments. À l'époque précédant le Code civil, les fonds d’entretien étaient difficiles à réunir et à utiliser, et leur rôle était effectivement très limité. Le Code civil a apporté plusieurs modifications afin de changer cette situation. Tout d'abord, avant le Code civil, la collecte et l'utilisation des fonds d’entretien étaient considérées comme une matière de décision spéciale, et le principe de double deux tiers constituait le plus grand obstacle institutionnel à l'utilisation desdits fonds. L'article 278, paragraphe 1 du Code civil répond donc à cette question en distinguant la collecte de nouveaux fonds d'entretien, et l'utilisation de fonds d'entretien déjà collectés. La première est toujours considérée comme une matière de décision spéciale, tandis que la seconde est reconnue comme une question de décision générale et donc soumise uniquement à l'exigence de la double majorité. Deuxièmement, le champ d'utilisation des fonds d’entretien a été élargi. Par rapport aux dispositions initiales de la Loi sur les droits réels, l'article 281, paragraphe 1, du Code civil élargit le périmètre des parties communes auxquelles les fonds d'entretien peuvent être affectés en ajoutant l'expression « toits, façades, accessibilité », d'une part, et en ajoutant, aux objectifs d'entretien traditionnels, le « renouvellement et rénovation » des parties communes, d'autre part, élargissant ainsi l'utilisation des fonds d'entretien. Enfin, l'article 281, paragraphe 2, du Code civil intègre également l'expérience avérée de la législation locale précédente et prévoit le droit d'utiliser les fonds d'entretien en cas d'urgence, permettant à l'assemblée des propriétaires et au comité des propriétaires de déroger à la procédure générale de vote pour l'utilisation des fonds d'entretien dans de tels cas.

Le troisième changement à mentionner est que le Code civil actuel ajoute également un certain nombre de dispositions qui renforcent la protection des droits des propriétaires. Par exemple, l'article 282 du Code civil nouvellement ajouté stipule que « les revenus générés par une entité de construction, une société de services immobiliers ou tout autre gestionnaire qui utilise les parties communes des propriétaires, appartiennent aux propriétaires après la déduction des coûts raisonnables. » Conformément à cette disposition, si une société de services immobiliers loue la façade d'un bâtiment à un tiers à des fins publicitaires, les revenus générés par la relation de location doivent être directement attribuables aux propriétaires, après avoir déduit des coûts raisonnables. Cette règle renforce indéniablement la protection des intérêts des propriétaires, mais il reste à voir si elle aura une incidence sur la motivation des sociétés de services immobiliers à accroître leurs revenus. En outre, les dispositions de cet article restent assez abstraites et doivent être davantage précisées en termes de procédures, d'objet et de partage des revenus.

 

Pour conclure

Globalement, les dispositions du Code civil sur la copropriété poursuivent en gros celles de la Loi sur les droits réels, sur la base desquelles des dispositions innovantes ont été prises, notamment en ce qui concerne la prise de décision des propriétaires et l'utilisation des fonds d'entretien. Cependant, la législation relative à la copropriété est un domaine juridique très concret, il reste donc à voir si les dispositions correspondantes du Code civil fonctionneront comme elles le devraient dans la pratique.

 

 


 

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