Testament
dans le contexte international
Angélique
CHEN
Membre
du pôle « Extrême-Orient » du Conseil Supérieur du Notariat, Notaire à Besançon
Dans une époque où les individus possèdent des
biens dans plusieurs pays, où les familles sont souvent dispersées à travers le
globe, et où les législations nationales varient considérablement, la
planification successorale prend une dimension complexe mais incontournable.
Le testament est un acte juridique par lequel une
personne (le testateur) exprime ses volontés concernant la répartition de ses
biens après son décès. La loi française prévoit plusieurs formes de testaments
qui répondent tous à des règles communes suivantes :
-
rédigé par écrit,
-
un acte unilatéral personnel à
son auteur. Le testament conjonctif, c'est-à-dire celui qui est
rédigé par plusieurs personnes (deux époux, par exemple), est nul (C. civ. art.
968).
-
En cas de non respecter des
conditions de forme, le testament est nul (C. civ. art. 1001).
-
Le testament ne peut être
contesté qu'après le décès du testateur auprès du tribunal judiciaire
compétent.
Voici les principales formes de testament et leur
exécution.
1. Les différentes formes de testament en France
a) Le testament olographe
Le testament olographe est un testament qui doit
être rédigé entièrement à la main par le testateur. Il ne nécessite pas
l'intervention d'un notaire et peut être rédigé sans témoins. Deux conditions
de forme :
- Rédaction manuscrite intégrale :
Le testament olographe doit
être « écrit en entier » de la main du testateur (C. civ. art. 970) et
doit être rédigé par le testateur lui-même en une langue qu’il comprend.
- Dater et signer : Le testament doit être daté par le testateur (C. civ. art. 970)
pour vérifier la capacité du testateur et pour appliquer le plus récent
des testaments s’il y en a plusieurs, dans l’hypothèse où il y aurait
l’incompatibilité entre les dispositions de dernière volonté
successivement adoptées. En l’absence de signature du testateur, le testament est nul.
Le testateur peut assumer lui-même la
conservation de son testament jusqu'à son décès, car le testament ne pourra
être exécuté en l’absence de l’original. En pratique, il est très souvent que
le testateur remet l’exemplaire original au notaire de son choix pour sa
conservation.
Avec l'autorisation du testateur, le notaire
procède à l'inscription du testament au fichier central des
dispositions de dernières volontés. Cette inscription n'est pas
obligatoire mais recommandée.
Ce fichier mentionne l'existence des dispositions
de dernières volontés reçues ou déposées dans tous les offices notariaux en
France. Lors du règlement d'une succession, le notaire a l'obligation
d'interroger ce fichier.
La Convention de Bâle du 16 mai
1972 signée par 10 États dont le France, a prévu l’institution d’un système
permettant à un testateur de faire inscrire son testament afin de réduire les
risques que celui-ci soit ignoré. Après le décès du testateur tout intéressé
peut interroger ce fichier. En France, le Conseil supérieur du Notariat est
l’organisme national qui procède à ces inscriptions et répond aux demandes de
renseignements.
b) Le testament
authentique
Le testament authentique est soumis à un formalisme très lourd.
Parce que le testament est reçu par deux
notaires, ou par un notaire en présence de deux témoins.
Il est dicté par le testateur au notaire qui
l'écrit ou le dactylographie puis en fait la lecture au testateur. Après
lecture, le testament est signé par le
testateur, le ou les notaires et les témoins. Si le testateur ne peut pas
signer, quelle qu'en soit la raison, il doit en faire la déclaration.
Le testament authentique présente plusieurs
intérêts. Notamment, la règle de forme sera respectée et
sa validité sera difficilement remise en question.
Comme tous les actes authentiques, le testament est établi en minute et
conservé par le notaire. Si le testateur veut révoquer le testament, il ne peut donc pas procéder par destruction.
Le testament est
inscrit au fichier central des dispositions de dernières volontés (FCDDV).
c) Le testament international
Le testament international créé
par la convention de Washington du 26 octobre 1973 et introduit en
France le 1er décembre 1994. L'intérêt de ce testament tient au fait qu'il est valable en la forme
quels que soient le pays où il a été fait, la situation des biens, la
nationalité, le domicile ou la résidence du testateur. Le testament international doit
être fait par écrit, mais pas obligatoirement de la main même du testateur. Il
peut être rédigé en n'importe quelle langue sous réserve que le testateur la comprenne
sans l'aide d'un interprète. En effet, le testateur devant affirmer que cet
écrit contient ses dernières volontés, cela suppose qu'il sache lire le texte. Le testament international doit être signé par le testateur en
présence de deux témoins et d'un notaire qui le signent également. Le notaire
date le testament et établit une attestation
indiquant que les formalités du testament international ont été remplies.
2. Exécution du testament
Le testament olographe
doit être déposé chez un notaire avant de pouvoir être exécuté (C. civ. art.
1007).
Avec l’original du testament, le notaire dresse
sur-le-champ procès-verbal (PV) de l'ouverture et de l'état du testament dans lequel il décrit le testament et précise les circonstances du dépôt (C.
civ. art. 1007, al. 1). Le testament et un
acte de décès du testateur sont annexés au procès-verbal, le tout étant
conservé au rang des minutes du notaire.
L’exécution du testament implique de régler la
succession du défunt. Il y a lieu de déterminer la loi applicable pour la
succession.
Le notaire joue un rôle central
dans l'exécution du testament, en particulier lorsqu’il s'agit de gérer la
succession. Il assure la légalité de l'exécution, la conformité aux volontés du
testateur, et veille au respect des obligations fiscales.
3. Règles de conflits de
lois
Le règlement du 4
juillet 2012 relatif à la compétence, la loi
applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et
l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création
d'un certificat successoral européen, dit « règlement Successions » est
applicable aux successions ouvertes depuis le 17 août 2015, c'est-à-dire
lorsque le décès est intervenu à compter de cette date.
La loi désignée en application du règlement
s'applique même si ce n'est pas celle d'un État membre, on parle de son
« caractère universel » (art. 20).
En principe, la loi applicable à
l'ensemble de la succession est celle de l'État dans lequel le défunt avait sa
résidence habituelle au moment de son décès.
Le règlement prévoit la possibilité pour une
personne de choisir la loi applicable
à l'ensemble de sa succession (art. 22). On
parle de « professio juris ». Ce choix ne
peut porter que sur une loi dont elle possède
la nationalité soit au moment où elle fait ce choix,
soit au moment de son décès.
Il est possible de faire ce choix de la loi
applicable dans un testament.
Conclusion
Le testament, qu'il soit olographe, authentique
ou international, est un instrument fondamental pour organiser la succession
d’une personne. Il nécessite de respecter des formes strictes et de suivre des
procédures rigoureuses pour être validé et exécuté correctement. Un notaire est
souvent impliqué dans ce processus pour garantir la légalité et la bonne
gestion des biens du défunt. La rédaction et l’exécution d’un testament sont
des étapes essentielles pour éviter les conflits et assurer une transmission sereine
du patrimoine.
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