Plan de site  |  Contact
 
2024
eVous êtes ici: Accueil → Courrier du Centr

Choisir son contrat de mariage

Sommaire

  • La loi ou le contrat
  • Le régime de communauté
  • La séparation de biens
  • La séparation de biens avec société d’acquêts
  • La participation aux acquêts
  • Les principaux contrats (tableau)
  • La communauté universelle
  • Les avantages matrimoniaux et le divorce
  • Les frais à prévoir
  • Un choix réfléchi

 


Pourquoi faire un contrat

Pour adapter votre régime matrimonial

à votre situation personnelle

et professionnelle.

 

 

 

Lorsqu’ils n’établissent pas de contrat au moment de se marier, les époux adoptent, souvent sans le savoir, le régime légal de communauté d’acquêts. Conçu pour le cas général, il trouve cependant ses limites dès que se présente une situation familiale ou patrimoniale particulière. Il en est ainsi, notamment, lorsque les époux exercent une profession indépendante entraînant des risques financiers. Il faut alors se tourner vers un autre statut mieux adapté.

 

 

 

La loi ou le contrat

 

Pourquoi faire un contrat de mariage, nous ne possédons rien ? Cette question, presque une boutade, les notaires l’entendent souvent. Les futurs époux prendront vite conscience des réalités économiques de la vie à deux. Il faudra meubler et équiper le logement, alimenter le compte en banque pour faire face aux dépenses du ménage, placer les économies. Le Code civil n’hésite pas à qualifier le ménage « d’association conjugale » (art. 1387). N’est-il pas préférable de commencer par en régler le fonctionnement ?

 

La question essentielle au moment du mariage – au plan matériel, évidemment – est celle de l’activité professionnelle que les futurs époux envisagent d’exercer. Quelle en sera la nature : salariée, libérale, commerciale ? Les conjoints travailleront-ils tous les deux, ou bien seulement l’un d’eux ? Faut-il dissocier certains intérêts et préserver l’indépendance de chacun, compte tenu des risques liés aux aléas des affaires, ou bien au contraire tout mettre en commun ?

 

Et puis un jour, le plus tard possible, le mariage prendra fin. Même si une loi du 3 décembre 2001 a augmenté les droits du conjoint survivant, il est possible de faire davantage. N’est-il pas opportun de prévoir, outre les donations que les époux pourront se consentir plus tard, certains avantages matrimoniaux qui ne peuvent être stipulés que dans le contrat de mariage ?

 

 

Le régime légal de la communauté

 

Fort heureusement, les conjoints, très nombreux en France, qui se marient sans contrat ne sont pas pour autant livrés à l’anarchie.

 

La loi les a dotés d’un statut : le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts, instauré en 1965 et considéré comme le mieux adapté aux aspirations du plus grand nombre de nos concitoyens et à l’idée qu’ils se font du mariage.

 

La liberté des conventions matrimoniales

 

Mais les situations particulières sont de plus en plus fréquentes, et les futurs époux sont assez souvent amenés à envisager d’autres régimes. Ils disposent d’une liberté quasi-totale, la référence à un régime étranger étant même possible, à condition qu’il ne soit pas contraire à des règles impératives de notre droit. La seule contrainte qui leur est imposée est de passer contrat devant notaire.

 

Le Code civil propose quelques modèles de conventions, qui peuvent d’ailleurs être aménagés par des dispositions particulières : la séparation de biens, assortie éventuellement d’une société d’acquêts, la participation aux acquêts, la communauté universelle. Elles couvrent un éventail assez large d’éventualités.

 

Nous les évoquerons à travers des cas d’espèce assez courants dans la pratique notariale.

 

 

 

Le régime de communauté

 

Exemple :

Marc Depuis, 30 ans, ingénieur dont la situation dans une grande entreprise est déjà stable, va épouser Sandrine Durand, 24 ans, intérimaire, qui envisage d’interrompre son activité professionnelle pour se consacrer à l’éducation de ses enfants. Les parents de l’un et de l’autre sont relativement fortunés.

 

Les rémunérations professionnelles du mari sont appelées à constituer l’essentiel, voire la totalité des ressources du ménage. Pour un certain temps du moins, car, plus tard, des placements pourront produire des revenus qui s’y ajouteront. L’activité de la femme, pour n’être pas rémunérée, s’en sera pas moins essentielle. Elle jouera le rôle de maîtresse de maison, pourvoira à l’éducation des enfants.

 

Peut-on modifier son régime matrimonial ?

Le célèbre principe de l’immutabilité des conventions matrimoniales a été considérablement assoupli par la loi du 13 juillet 1965 puis par celle du 23 juin 2006. Il est possible de modifier son régime matrimonial ou même d’en changer complètement à condition que :

·Deux années se soient écoulées depuis le mariage, s’il s’agit de régime initial, ou depuis le précédent changement, s’il n’est pas le premier ;

· La modification soit motivée par l’intérêt de la famille et ne constitue pas une fraude aux droits des tiers, créanciers, par exemple.

L’acte est établi par un notaire et n’est pas soumis à l’homologation du tribunal de grande instance que si les époux ont des enfants mineurs, ou en cas d’opposition des enfants majeurs ou des créanciers.

 

Sur deux plans différents, mais aussi importants l’un que l’autre, les deux époux contribueront à la prospérité du couple. Il serait injuste que le mari soit le seul à en bénéficier. Ce serait le cas si les époux venaient à faire choix de la séparation de biens.

 

Aussi préféreront-ils un régime leur permettant de mettre en commun les économies et les placements réalisés au cours du mariage, tout en conservant personnellement les biens qu’ils recevront en héritage ou donation, de leurs parents par exemple.

 

Les biens propres et les biens communs

 

C’est le régime de droit commun, en quelque sorte, celui auquel sont soumis, depuis le 1er février 1966, les époux qui se marient sans contrat. Cela ne veut pas dire qu’il est inutile d’en faire un lorsque les époux décident de l’adopter. Certaines clauses prévues seulement en option par la loi peuvent s’avérer fort utiles au moment du partage des biens, il s’agit des avantages matrimoniaux (voir page 8 et 21). Sa principale caractéristique est de distinguer trois masses de biens :

§     Ceux qui dépendent de la communauté ;

§     Les biens propres de la femme ;

§     Les biens propres du mari.

 

Les biens de communauté englobent tout ce qui est investi ou acheté au cours du mariage au moyen des gains et salaires de l’un ou l’autre des époux, des bénéfices réalisés dans le cadre d’une activité agricole, libérale ou commerciale, ou grâce aux revenus des biens propres.

 

Les biens propres comprennent tous ceux appartenant à chacun des époux au jour du mariage et ceux qui leur adviennent au cours de celui-ci par succession, donation ou legs. Ainsi, M. et Mme Dupuis demeureront seuls propriétaires de tout ce qu’ils recueilleront éventuellement de leurs parents. S’ils viennent à vendre un bien propre au cours du mariage, ils pourront en acquérir un autre, en remploi du prix, qui aura également la qualité de propre. L’article 1404 du Code civil énumère d’autres biens qu’il déclare « propres par leur nature » : parmi eux, les vêtements à l’usage personnel de l’un des époux, les créances ou pensions obtenues en réparation d’un dommage corporel ou moral. Entre dans cette catégorie l’indemnité due au conjoint victime d’un accident. Les instruments de travail nécessaires à la profession d’un époux sont propres également, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce, mais à charge d’indemniser la communauté par le jeu des récompenses, dont nous reparlerons (voir page 8).

 

La gestion des biens communs

 

Communauté de meubles et acquêts

C’est, toujours aujourd’hui, le régime auquel sont soumis les nombreux époux qui ont convolé avant le 1er février 1966 sans avoir fait de contrat et qui n’ont pas déclaré vouloir se soumettre au nouveau statut légal. Il peut maintenant être choisi comme régime conventionnel, mais les statistiques montrent qu’il ne suscite plus guère d’intérêt parmi les candidats au mariage. Il s’agissait déjà d’une communauté, mais dans laquelle étaient englobés tous les biens de nature mobilière, quelle qu’en soit l’origine. Ainsi, ceux provenant d’une succession se trouvaient incorporés dans l’actif commun, tout comme ceux achetés avec les économies du ménage. À titre d’exemple, lorsqu’un conjoint marié sous ce régime reçoit dans la succession de ses parents une maison et un fonds de commerce, la maison lui est seule propre tandis que le fonds de commerce entre dans la communauté. Sous le nouveau régime légal, ces deux éléments patrimoniaux appartiennent personnellement à l’époux héritier.

Le mari était autrefois le « seigneur et maître de la communauté ». Lui seul avait pouvoir d’administrer les biens communs et d’en disposer. La femme bénéficiait de quelques mesures de protection.

 

Une telle situation ne pouvait perdurer. La loi du 13 juillet 1965, puis celle du 23 décembre 1985 ont placé les deux époux sur un pied de parfaite égalité. Chaque conjoint a pouvoir d’administrer seul les biens communs, et même d’en disposer. C’est ce que l’on appelle le principe de la gestion concurrente. Il n’est pas sans susciter quelques difficultés – à propos des dettes notamment, comme nous allons le voir – mais il y a toujours des difficultés quand on ne s’entend plus. L’accord des deux époux est d’ailleurs nécessaire pour certaines opérations importantes : ventes ou apports en société d’immeubles, de fonds de commerce, de droits sociaux, emprunts hypothécaires, donations, baux ruraux et commerciaux. On parle alors de gestion conjointe ou de cogestion. À noter que le bail d’habitation peut être signé par un seul époux.

 

… et celle des biens propres

 

Les pouvoirs d’administration et de disposition de l’époux auquel ils appartiennent sont absolus. Une seule restriction : si le logement familiale appartient personnellement à l’un des conjoints, il ne pourra pas le vendre (ou l’hypothéquer) sans le consentement de l’autre.

 

Les dettes

 

Elles sont, selon leur origine, à la charge de chaque conjoint personnellement ou de la communauté. Elles peuvent avoir été contractées par un seul ou par les deux époux.

 

Passif propre. Les dettes dont chacun était tenu au jour du mariage ou dont sont grevées les successions qu’il recueille lui demeurent personnelles. Elles engagent ses biens propres mais aussi ses revenus, notamment ses gains et salaires, bien qu’ils appartiennent à la communauté.

 

Passif commun. La question qui se pose à cet égard est celle de savoir quels biens sont engagés lorsque la dette a été souscrite par un seul des époux. Autrement dit, quels seront ceux sur lesquels les créanciers pourront exercer leur droit de poursuite ?

 

La réponse est claire, du moins dans son principe : la signature d’un seul époux engage tous les biens de communauté, conséquence logique de l’indépendance et de l’égalité de pouvoirs proclamée par la loi du 23 décembre 1985. Elle oblige aussi ses biens propres, mais non ceux de son conjoint (Code civil, art. 1418). Quelques atténuations à la rigueur de cette règle :

·Les gains et salaires d’un époux ne peuvent être saisis par les créanciers de son conjoint, à moins que l’obligation n’ait été contractée « pour l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants » (Code civil, art. 1414). Les dépenses excessives et les achats à tempérament sont donc exclus ;

·Les dettes résultant d’un cautionnement ou d’un emprunt souscrit par un époux sans le consentement de l’autre n’engageront pas la communauté mais seulement ses biens propres et ses revenus (art. 1415) ; toutefois, les créanciers – les établissements de crédit en particulier – sont enclins à exiger le concours des deux époux lors de l’emprunt ou du cautionnement ; la dette engage alors l’ensemble de leurs patrimoines (propres et communs).

 

Rappelons que certains actes comme les ventes de biens immobiliers communs nécessitent la signature des deux conjoints à peine de nullité (voir page 6).

 

La dissolution du régime

 

La communauté est dissoute par la mort de l’un des époux, par le divorce, la séparation de corps, la séparation de biens judiciaire, le changement de régime. L’article 1441 du Code civil ajoute que « par l’absence déclarée ». Il s’agit alors d’en partager l’actif et le passif entre le survivant et les héritiers de l’autre en cas de décès, ou entre les époux dans les autres hypothèses.

 

Moitié chacun. C’est l’intérêt essentiel du régime que d’attribuer à chacun des époux (ou à ses héritiers) la moitié de tous les biens acquis au cours du mariage, quelle que soit sa participation financière aux investissements. Ainsi Mme Dupuis, même si elle n’a pas exercé d’activité professionnelle, profitera-t-elle à égalité avec son mari des bénéfices de l’association conjugale.

 

L’absence d’un époux

Il y a absence lorsque l’un des époux a disparu et que son existence est incertaine. Un premier jugement constate la présomption d’absence et, dix ans plus tard, l’absence peut être déclarée. La communauté est alors dissoute.

Les récompenses. La plus stricte égalité sera préservée par le jeu des « récompenses ». Ce terme technique désigne les sommes dues par l’un des époux à la communauté, ou inversement, à raison des mouvements de fonds qui ont pu intervenir au cours du mariage entre la masse commune et celle propre à chaque époux. Ainsi, la communauté a pu payer une dette incombant personnellement à l’un des conjoints. Autre exemple, une maison a pu être construite pendant le mariage avec l’argent de la communauté sur un terrain appartenant en propre à l’un des époux. La maison appartient à ce dernier, mais à charge d’indemniser la communauté. C’est ce que l’on appelle la récompense.

 

Les biens propres. Le partage s’accompagne de la reprise des biens propres à chacun. Il en sera ainsi de ceux éventuellement recueillis par M. et Mme Dupuis dans les successions de leurs parents, qui demeureront, bien sûr, leur propriété respective.

 

Les avantages matrimoniaux

 

Il s’agit de certaines clauses pouvant être stipulées dans un contrat de mariage en faveur de l’un des époux ou du conjoint survivant. Elles permettent à ce dernier, par exemple, de prélever avant tout partage, avec ou sans indemnité, certains biens communs : logement, meubles, fonds de commerce, somme d’argent.

 

Clause de partage inégal. Il peut même être dérogé à l’égalité du partage, le survivant recevant une part supérieure à la moitié. Un tel avantage n’est pas considéré comme une donation, sauf lorsque le défunt laisse des enfants qui ne sont pas issus des deux époux. Conséquence non négligeable, il n’est pas assujetti aux droits de succession. Nous ne conseillerons pas à M. et Mme Dupuis une clause dérogeant à l’égalité du partage, compte tenu de son irrévocabilité sauf en cas de divorce. Peut-être pourront-ils y penser beaucoup plus tard, dans le cadre d’une modification de leur régime si, par exemple, leur espoir d’avoir des enfants venait à être déçu.

 

 

La séparation de biens

 

Dans les deux cas que nous allons évoquer, le régime de séparation de biens peut être choisi.

 

Exemple :

Vincent Delarue, 35 ans, envisage d’acquérir, au moyen d’un emprunt, l’entreprise de transports dans laquelle il travaille depuis dix ans en qualité de directeur. Agnès Chambrun, 32 ans, qu’il doit épouser, dirige de son côté le service des relations publiques d’une importante compagnie de navigation. Elle est susceptible, plus tard, d’exercer son activité dans l’entreprise de son mari. Elle dispose déjà de quelques économies et l’appartement dans lequel le couple va s’installer lui appartient. Elle entend pouvoir le vendre, si besoin est, sans aucune contrainte.

 

Les projets du futur marié comportent quelques risques commerciaux et financiers, tandis que la future épouse a déjà une situation bien assise. Ils ont besoin de la plus grande autonomie possible et leurs patrimoines respectifs doivent demeurer individualisés autant que faire se peut. Le régime de la séparation de bien peut sans doute être conseillé à ce couple. Cependant, les époux devront en connaître les limites et les pièges.

 

Le modèle en est fourni par le Code civil, comme nous l’avons dit. Il faut établir un contrat notarié pour y être soumis. Son fonctionnement est simple, au moins en principe. Il n’existe que deux catégories de biens : ceux de la femme et ceux du mari.

 

Pas de biens communs

 

Tout ce que chaque époux possédera au jour du mariage, recueillera par succession ou achètera à son nom pendant le mariage lui restera propre. Il aura le droit de le louer, de le donner, de le vendre sans aucune restriction. Une exception, cependant : la future épouse sera déçue d’apprendre qu’elle ne pourra vendre son appartement sans le consentement de son mari, bien qu’il lui appartienne personnellement, dès lors qu’il constituera le logement de la famille (art. 215 du Code civil). Les biens achetés ensemble ne seront pas communs mais soumis aux règles de l’indivision ordinaire, d’où une certaine précarité.

 

Pas de dettes communes mais …

 

Corrélativement à l’absence d’actif commun, il n’existe pas de passif commun. Chacun des époux est seul tenu des dettes qu’il a contractées. L’autre n’en est aucunement responsable et ne peut être poursuivi à leur égard. Ce principe souffre deux exceptions. Les époux sont solidairement tenus, la plupart du temps, des dettes fiscales, quel que soit leur régime matrimonial. Ils sont également solidaires pour les dettes nécessitées par l’entretien du ménage et l’éducation des enfants, à la condition qu’il ne s’agisse pas de dépenses excessives ou d’achats à tempérament (Code civil, art. 220).

 

Les pièges du régime

 

L’époux commerçant est parfois tenté d’acheter certains biens – immobiliers notamment – au nom de son conjoint, avec des fonds provenant de son commerce, de manière à les soustraire aux éventuelles poursuites de ses propres créanciers. Ceux-ci ont le droit de prouver, s’il fait de mauvaises affaires, qu’il a financé les acquisitions de son conjoint, auquel cas elles n’échapperont pas leur droit de poursuite.

 

Les risques du cautionnement

Est-il besoin de rappeler que, lorsqu’ils consentent un prêt à un débiteur séparé de biens, les établissements financiers lui demandent souvent le cautionnement de son conjoint. Mme Delarue (exemple page 9) prendra garde de ne pas le donner lorsque son mari achètera son entreprise de transports. Sinon, elle engagera son propre patrimoine, et l’un des avantages de son régime matrimonial disparaîtra.

n Les donations occultes. Le régime de la séparation de biens est le domaine privilégié des dons manuels, donations indirectes ou déguisées. Lorsqu’un époux achète un bien au nom de son conjoint, non plus pour échapper à d’éventuels créanciers mais dans le but de l’avantager, l’opération recouvre une libéralité entre époux. De telles donations étaient autrefois d’une validité contestable et, en tout cas, révocables à tout moment par la seule volonté du donateur, d’où une grande instabilité dans les rapports juridiques des époux et de nombreuses contestations lorsqu’un divorce survenait. La réforme du divorce du 26 mai 2004, entrée en vigueur le 1er janvier 2005, a supprimé la sanction de nullité frappant les donations déguisées entre époux et rendu les donations de biens présents irrévocables. Les acquisitions faites par l’un des époux avec l’argent de l’autre et les acquisitions indivises financées par un seul époux constituent désormais des donations entre époux de biens présents et sont irrévocables, sauf quelques exceptions visant des situations très particulières, énumérées par les articles 953 et suivants du Code civil. Il faut être conscient toutefois que de telles libéralités, le plus souvent occultes, ne sont pas à l’abris de certains risques, notamment fiscaux ou encore successoraux (réduction pour atteinte à la réserve).

 

La femme salariée du mari

 

Si Mme Delarue vient à travailler, comme elle le souhaite, en qualité de salariée dans l’entreprise de son mari, elle trouvera dans le régime choisi un avantage fiscal certain. Sa rémunération sera déductible en totalité des bénéfices à la condition, bien sûr, qu’elle corresponde à un travail effectif et ne soit pas excessive par rapport au service rendu.

 

n La règle du jeu. On s’aperçoit que, s’il convient au cas d’espèce envisagé, le régime de la séparation de biens demande à être appliqué rigoureusement. Il peut constituer pour une femme qui entendrait se consacrer à son foyer – et se désintéresserait des affaires du ménage – un réel danger. Le mari seul prospérera, alors que l’épouse courra le risque de se retrouver à la fin du parcours aussi dépourvue qu’au premier jour. Mais, n’étant pas disposée à « laisser faire », Mme Delarue n’a pas à redouter un tel inconvénient.

 

Autre cas de séparation de biens

Exemple :

Jean-Claude Pradal, 58 ans, veuf en premières noces avec deux enfants, envisage de se remarier avec Monique Lafarge, qui est également veuve avec trois enfants et a le même âge. Tous les deux ont quelques biens et sont encore en activité. Ils souhaitent que leurs enfants respectifs n’aient pas à souffrir de leur remariage lorsqu’ils disparaîtront.

 

Régime matrimonial et donation entre époux

Le régime matrimonial n’est pas sans influence sur les droits du conjoint survivant. Ainsi, celui de la communauté réduite aux acquêts lui attribue, sauf disposition contraire, la moitié des biens communs. Certaines clauses, dites de survie, stipulées dans un contrat de mariage peuvent par ailleurs lui procurer des avantages non négligeables. Il n’en est pas moins utile, si l’on veut améliorer encore sa situation, de l’instituer donataire ou légataire de la part du prémourant dans la communauté et de ses biens propres au moyen de ce que l’on appelle une donation entre époux ou au dernier vivant, ou d’un  testament. De telles libéralités peuvent être consenties dans le contrat de mariage, mais elles présentent l’inconvénient d’être irrévocables. Aussi préférera-t-on généralement les régulariser pendant le mariage. Elles sont alors révocables à tout moment, en cas de mésentente par exemple. Elles permettent au survivant de recevoir la totalité des biens du prémourant s’il ne laisse aucun héritier à réserve (descendants). Au cas où il existerait des enfants, il pourra prétendre notamment à un quart des biens successoraux en propriété et à l’usufruit du surplus.

Voici un cas bien différent du précédent qui peut cependant comporter la même solution. Monique Lafarge et Jean-Claude Pradal possèdent quelques biens et sont susceptibles d’en acquérir d’autres puisqu’ils exercent encore tous les deux une profession. Leur désir de ne pas compliquer la dévolution de leurs biens entre leurs enfants respectifs lorsqu’ils viendront à disparaître conduit à exclure un régime communautaire.

 

La séparation de biens, là encore

 

Seul le régime de la séparation de biens permet de dissocier le patrimoine présent et futur de chaque époux. Dans le cas de cette famille, il ne faut pas que les enfants du mari participent au partage des biens de la femme, et inversement. Sinon, des conflits risqueraient de surgir. Toute masse commune est donc à proscrire. Cependant, comme l’a dit le professeur Cornu, « la vie du ménage soumet le fonctionnement du régime à des contingences naturelles ».

 

Le mobilier

 

Ainsi, le mobilier de chacun des époux se trouvera confondu à leur domicile commun. Un inventaire de ce qui appartient à l’un et à l’autre sera utilement annexé au contrat. Une clause dite de « présomption de propriété » devra être stipulée pour les meubles, bijoux, argenterie qui viendraient à s’y ajouter par la suite, de manière à éviter toute discussion au décès (ou en cas de rupture).

 

Les libéralités

 

M. et Mme Pradal souhaiteront peut-être assurer au survivant la jouissance, sa vie durant, des biens qu’ils possèdent, alors que le conjoint survivant n’a droit qu’à quart en propriété en présence d’enfants non issus des deux époux (loi du 3 décembre 2001). La donation de biens à venir qu’ils se consentiront au cours du mariage (de manière à pouvoir la révoquer en cas de mésentente) sera limitée à l’usufruit et, par testament, la vocation en propriété sera éventuellement exclue.

 

Rappelons cependant que la loi du 3 décembre 2001 accorde au conjoint survivant un droit viager au logement qui s’impute sur ses droits légaux (voir Mémo de Conseils, la Donation entre époux).

 

 

 

Séparation de biens avec société d’acquêts

 

Exemple :

Bertrand Dupuis, exploitant agricole, et Florence Méric, courtier en assurance, se marient. Bertrand est propriétaire d’un terrain sur lequel le couple va édifier une maison d’habitation. Florence dispose d’économies dont elle entend faire usage pour financer une part importante des constructions. Les époux veulent conserver une indépendance de leurs patrimoines et, en conséquence, envisagent un régime de séparation de biens, mais l’épouse souhaite que le couple soit propriétaire du domicile familial.

 

Le régime de la séparation de biens peut être conseillé à ces époux disposant chacun de revenus distincts et souhaitant une certaine autonomie. Pour répondre au souhait de l’épouse, il est possible d’aménager le régime de la séparation de biens en lui adjoignant une société d’acquêts. Cette société d’acquêts est une masse commune à laquelle l’époux peut apporter un bien particulier et notamment le terrain.

 

La mise en place d’une société d’acquêts permet aux époux d’avoir, à côté de leurs patrimoines personnels respectifs, une masse commune. Cela corrige certains inconvénients du régime de séparation de biens (absence de partage des richesses des époux) tout en minimisant les risques attachés au régime de communauté puisque l’étendue de la société d’acquêts est librement définie par les époux.

 

Les masses de biens. Il faut distinguer trois masses de biens : les biens personnels à chacun des époux et le biens qui entrent dans la société d’acquêts.

Celle-ci peut être étendue et comprendre les revenus des époux et l’ensemble des acquêts. Ce régime s’apparente alors au régime de la communauté de biens réduite aux acquêts. Il est également possible de convenir d’une composition de la société d’acquêts limitée à certains biens ou certaines catégories de biens, tels les meubles ou les immeubles. Le principe de la liberté des conventions matrimoniales permet de nombreuses variations quant au choix de la composition de la société d’acquêts. Ainsi, cette société peut valablement être composée d’un bien ou de certains biens déterminés, et notamment la résidence de la famille.

 

Apport d’un bien particulier. Les époux peuvent choisir d’apporter un bien personnel à la société d’acquêts. Cela leur permet d’être copropriétaires de ce bien. On songe notamment à l’époux propriétaire à titre personnel d’un terrain à bâtir sur lequel les époux envisagent d’édifier une construction, ce qui est le cas du couple dont nous évoquons le projet.

 

La gestion des biens dépendant de la société d’acquêts. Les biens personnels sont administrés comme sous la séparation de biens pure et simple et les biens dépendant de la société d’acquêts sont gérés comme des biens communs : gestion concurrente, cogestion (voir page 6).

 

Les dettes des époux. Toute dette née pendant le mariage, qu’elle résulte des deux époux ou seulement de l’un des époux, engage les biens dépendant de la société d’acquêts. Tous les biens dépendant de la société d’acquêts font partie du gage des créanciers des époux. À cet égard, lorsque l’un des époux a une profession dite « à risques financiers », il peut être prudent de limiter la composition de la société d’acquêts afin de protéger le patrimoine de l’autre époux. Toutefois, lorsqu’un époux souscrit seul un emprunt ou un cautionnement (Code civil, article 1415), les biens dépendant de la société d’acquêts ne sont pas engagés si l’époux non souscripteur n’a pas donné son consentement.

 

Modalités de partage de la société d’acquêts. La dissolution, la liquidation et le partage de la société d’acquêts obéissent aux règles de la communauté. En l’absence de stipulation contraire, les biens dépendant de la société d’acquêts sont partagés par moitié entre les époux.

 

La convention pourrait, toutefois, être assortie d’une clause de préciput ou d’une clause d’attribution inégale ou intégrale de la société d’acquêts (voir page 8).

 

 

 

La participation aux acquêts

 

Exemple :

Bertrand Vidal, 40 ans, propriétaire et expert foncier, doit épouser Marine Buc, 34 ans. Celle-ci se propose d’acquérir une officine de pharmacie. Elle souhaite pouvoir l’administrer et en disposer librement. Le régime de la séparation de biens lui donnerait satisfaction sur ce point mais les autres conséquences de ce régime paraissent injustes aux futurs époux.

 

Les époux qui font choix de la séparation de biens afin de préserver leur indépendance professionnelle et de limiter les risques financiers regrettent souvent que leur conjoint ne puisse participer automatiquement, comme ce serait le cas sous le régime de la communauté, à l’enrichissement procuré par la bonne marche des affaires. Ils aimeraient pouvoir profiter tout à la fois des avantages de la séparation de biens et de ceux de la communauté.

 

Un régime de séparation

 

La loi du 13 juillet 1965, modifiée par la loi du 23 décembre 1985, a introduit dans notre droit un nouveau régime susceptible de satisfaire ce « désir combiné d’indépendance et de participation aux bénéfices ». C’est celui de la participation aux acquêts. Nos voisins allemands et suisses le connaissent bien puisque c’est leur statut légal (celui des époux qui se marient sans contrat).

 

Avec une participation à l’enrichissement

 

Pendant le mariage, il fonctionne comme si les époux étaient séparés de biens. À sa dissolution, on liquide leurs droits, un peu comme sous le régime de la communauté réduite aux acquêts.

 

Il n’y a pas, cependant, de masse commune partageable en nature. Les époux demeurent personnellement propriétaires des biens qu’ils ont acquis à leur nom au cours du mariage comme de ceux qu’ils possédaient en se mariant ou qu’ils ont recueillis par succession.

 

 

 

Les principaux contrats de mariage

 

La communauté de biens réduits aux acquêts*

 

 

 

POUR

 

CONTRE

 

 

 

• Répond aux aspirations de la grande majorité des futurs époux.
• Bénéfices, gains et salaires d’un époux profitant à l’autre, même s’il n’a pas d’activité rémunérée.
• Biens reçus par héritage ou donation restant propres.
• Égalité de pouvoirs des deux époux.
• Signatures conjointes pour les actes importants.
• Convient aux jeunes époux dont un seul doit avoir une activité rémunérée.

 

• Difficultés liées au partage des biens communs en cas de conflit.
• Évaluation délicate des récompenses (sommes dues par les époux à la communauté, ou inversement) à la fin du régime.
• Fiscalité pénalisante si l’un des époux est salarié de l’autre.
• « Mauvaises affaires » d’un conjoint susceptibles de mettre en péril l’ensemble du patrimoine commun.
• Gestion égalitaire et concurrente pouvant conduire au blocage en cas de mésentente.

* A remplacé la séparation de biens comme régime légal en Italie 1975.

 

 

 

 

 

 

La communauté universelle (avec clause d’attribution au conjoint survivant)

 

 

 

POUR

 

CONTRE

 

 

 

• Régime le plus simple. Symétrie entre communauté de vie et l’intérêts.
• Pour le conjoint survivant, possibilité de disposer seul de tous les biens et fiscalité avantageuse.
• Souvent recommandé aux personnes âgées n’ayant pas d’enfants.

 

• Droits réservataires des enfants du mariage sacrifiés si l’époux survivant dispose des biens.
• Fiscalité alourdie à leur détriment au décès du second conjoint.
• Irrévocabilité de la clause d’attribution profitant au survivant, sauf en cas de divorce où elle est révoquée de droit.

 

 

 

 

 

 

La participation aux acquêts*

 

 

 

POUR

 

CONTRE

 

 

 

• Avantages (pendant le mariage) de la séparation de biens sans les inconvénients (à la fin du régime).
• Satisfait le « désir combiné d’indépendance et de participation aux bénéfices ».
• Possibilité de limiter la créance de participation lorsqu’il existe des biens professionnels.

 

• Régime hybride.
• Difficultés d’évaluation des patrimoines d’origine à la fin du régime.
• Incertitude liée au correctif d’équité prévu par l’article 1578 du Code civil.
• Règlement de la dette de participation pour l’époux exerçant une activité professionnelle, sauf clause particulière relative aux biens professionnels.

* Régime légal en Suisse et en Allemagne.

 

 

 

 

 

 

La séparation de biens

 

 

 

POUR

 

CONTRE

 

 

 

• Totale indépendance patrimoniale des époux.
• Protège chaque époux des poursuites des créanciers de son conjoint.
• Possibilité d’acquérir un bien en indivision.
• Simplicité relative de liquidation du régime lors de sa dissolution.
• Peut convenir aux commerçants, aux époux exerçant l’un et l’autre une activité lucrative et, parfois, à ceux ayant des enfants d’un précédent mariage.

 

• Bénéfices, gains et salaires de l’un des époux ne profitant pas à l’autre.
• Dangereux pour le conjoint sans activité professionnelle.
• Indépendance financière ne jouant pas (généralement) à l’égard du fisc.
• Inconvénients de l’indivision ordinaire pour les biens acheté « à deux ».
• Depuis le 1er janvier 2005, les donations entre époux de biens présents (par exemple une somme d’argent) sont irrévocables.

 

La volonté du testeur ou donateur

Les biens légués ou donnés à l’un des conjoints sous la condition qu’ils soient exclus de la communauté demeurent propres à l’époux légataire ou donataire. En pareil cas, la volonté du défunt ou du donateur l’emporte sur les conventions matrimoniales.

On mesure seulement l’enrichissement de chacun en comparant son patrimoine final à celui d’origine (qui comprend les biens qualifiés de « propres » sous le régime de la communauté réduite aux acquêts). C’est ce que l’on appelle le décompte de la créance de participation. L’enrichissement, s’il en est constaté un, est partagé par moitié entre les deux conjoints. Le déficit éventuel reste à la charge de l’époux concerné. Le patrimoine final de chaque époux est estimé en fonction de l’état et de la valeur des biens le composant au jour de la liquidation du régime. Le patrimoine d’origine est estimé d’après sa valeur à la même date, mais en fonction de son état au moment du mariage, de la donation ou de la succession.

 

Les biens professionnels

 

Séduisant dans son principe, ce régime a de fervents partisans (J.-F. Pillebout, La participation aux acquêts. Formules commentées de contrats de mariage, Litec 2005). Mais il peut comporter, spécialement en cas de divorce, une difficulté liée aux biens acquis par un époux pour y exercer son activité professionnelle. Leur valeur au jour de la liquidation du régime entre, en effet, en ligne de compte pour le calcul de la créance de participation.

 

Imagions que M. et Mme Vidal divorcent après quelques années de mariage. La pharmacie acquise par l’épouse représente alors une valeur de 750 000 €, tandis que le patrimoine du mari n’a pas évolué depuis le mariage. C’est une somme de 375 000 € qu’elle devra lui verser. En aura-t-elle les moyens ?

 

Une clause limitant le risque

 

On suggère parfois, pour prévenir une telle situation qui risque de priver l’intéressé de son « outil de travail » de plafonner le montant de la créance de participation à une fraction des acquêts n’ayant pas le caractère de biens professionnels.

 

L’époux n’exerçant pas d’activité professionnelle ne sera pas lésé pour bénéfices d’exploitation. S’ils adoptent ce régime, les époux doivent être bien conscients de son caractère particulier. Le mari, en l’occurrence, doit avoir bien compris qu’il n’aura pas de droit sur la pharmacie.

 

 

 

La communauté universelle

 

Exemple

M. Ludovic Lacroix, 63 ans, retraité, et Mlle Colette Delamare, 61 ans, également retraitée, envisagent de se marier après avoir longtemps vécu en concubinage. Ils ont deux enfants communs, Anne et Pierre. Ils possèdent l’un et l’autre un patrimoine relativement important, dont ils entendent faire bénéficier le survivant. Ils souhaitent organiser la protection de celui-ci et éviter qu’il ne se retrouve, lorsque le premier disparaîtra, en indivision avec les enfants.

 

M. Lacroix et Mlle Delamare pourraient tout simplement se marier sans contrat et se consentir réciproquement des donations de bien à venir (après le mariage) ou encore instituer le survivant légataire universel par testament. Cette solution présente deux inconvénients. La donation ou le legs peuvent être révoqués par un époux seul sans que l’autre soit nécessairement averti. Surtout, comme ils ont des enfants qui sont héritiers réservataire, que la loi interdit d’exclure totalement de la succession, la libéralité ne pourrait pas recevoir entière exécution. Elle serait limitée à la quotité disponible spéciale entre époux, qui est, au choix du survivant et en présence de deux enfants, soit la propriété du tiers de la succession, soit la totalité en usufruits, soit enfin un quart en propriété et trois-quarts en usufruit (voir Mémo de Conseil, Recueillir en héritage).

 

Un moyen s’offre à eux d’éviter ces inconvénients sans pénaliser le fisc puisque, depuis l’entrée en vigueur de la loi Tepa le 21 août 2007, le conjoint survivant est exonéré de droits de succession. Il s’agit d’adopter le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégral. L’idée est de tout mettre en communauté et de prévoir que les biens communs seront la propriété du survivant.

 

Un régime simple

 

La communauté universelle a le mérite de la simplicité : plus de biens propres, ni de récompenses. Les auteurs du Code civil n’ont pas eu besoin de plus d’un article pour le réglementer.

 

Le principe. Tous les biens que les époux possèdent au jour du mariage, ceux qu’ils pourront acquérir par la suite ou recueillir par succession, donation ou legs, forment une seule masse commune. Corrélativement, toutes les dettes sont à la charge de la communauté, quelle que soit leur nature ou leur origine. Chaque époux dispose des mêmes pouvoirs que s’il était marié sous le régime de la communauté légale (premier cas, page 4).

 

Les exceptions. Certains biens déclarés par l’article 1404 du Code civil «propre par nature» sont exclus de la communauté, sauf stipulation contraire. Ainsi en est-il, comme nous l’avons vu (premier cas), des actions en réparation d’un dommage corporel ou moral et aussi « des créances et pensions incessibles et plus généralement (de) tous les biens qui ont un caractère personnel et (de) tous les droits exclusivement attachés à la personne».Si l’on veut que la communauté soit réellement universelle, il convient donc de déroger, dans le contrat de mariage, à cette règle, comme le permet l’article 1526.

 

La clause d’attribution

 

Dans un régime de communauté universelle, comme dans tout autre régime de communauté, l’actif et le passif sont normalement partagés par moitié entre les deux époux. Mais il est souvent convenu, dans le contrat de mariage, que le survivant sera attributaire de la totalité des biens communs, à charge de payer seul l’ensemble des dettes. Une telle convention, dite clause d’attribution intégral, n’est pas regardée comme une libéralité sauf si le défunt laisse des enfants non issus des deux  époux.

 

Des droits hors succession. Conséquence intéressante au plan civil : le conjoint survivant reçoit tous les biens hors succession. Il ne se trouve pas en indivision avec les enfants du couple et n’a donc aucun compte à leur rendre. Ceci explique en grande partie l’intérêt porté à ce régime lorsque le patrimoine des époux est essentiellement composé de biens acquis au cours de mariage, au moyen des revenus de leur travail.

 

Reprise des apports. Les parents du conjoint prédécédé (éloignés, en l’occurrence) ne pourront rien réclamer sur ses apports, à condition cependant que le droit de reprise (prévu par l’article 1525, 2e alinéa, du Code civil) ait été écarté dans le contrat de mariage, ce qui est possible, même s’il existe des enfants du mariage.

 

Une application limitée

 

Un tel régime ne saurait cependant être conseillé inconsidérément. Les jeunes époux n’y ont guère recours, sauf dans les trois départements de l’Alsace et de la Moselle, pour des raisons historiques. Pareillement, lorsque les époux ont eu ensemble des enfants (ce qui est le cas de Ludovic Lacroix et de Colette Delamare), l’adoption du régime de la communauté universelle (au moment du mariage ou lors d’un changement de régime matrimonial) doit faire l’objet d’un choix réfléchi. Dans tous ces cas, il faut bien voir en effet que les droits réservataires des enfants du mariage sont totalement sacrifiés au bénéfice de conjoint survivants susceptible de dilapider, sous de mauvaises influences, la totalité du patrimoine commune. Et, même si le conjoint conserve le patrimoine, la charge fiscale qui pèsera sur les enfants lors de so, n décès se trouvera alourdie car ils ne bénéficieront, au décès du survivant, qu’une seule fois de l’abattement, de 156 359 € en 2009, et des tranches inférieures du barème.

 

Lorsque les époux ont des enfants non communs, l’intérêt du régime de la communauté universelle avec attribution intégrale est encore plus réduit. Pour protéger les droits de ces enfants, qui n’hériteront peut-être pas du conjoint survivant, le Code civil requalifie le contrat de mariage en libéralité. Le survivant ne recueille alors plus les biens hors succession et il ne peut recevoir plus que par donation ou testament.

 

La rédaction du contrat de mariage doit donc être adaptée à chaque situation. Si, par exemple, il est habituel que la clause d’attribution intégrale soit stipulée au profit du survivant quel qu’il soit, elle peut aussi l’être en faveur d’un seul époux, la femme notamment. C’est une modalité intéressante quand un seul des conjoints a eu des enfants de précédente union (mariage ou concubinage). De la même manière, la clause peut prévoir l’attribution au survivant de la propriété des biens ou seulement de leur usufruit. Les enfants recueillent alors la nue-propriété. Ils doivent laisser le survivant jouir des biens et ne peuvent lui imposer un partage ; au décès du conjoint usufruitier, son droit s’éteint et la propriété des biens revient aux enfants en franchise d’impôt.

 

 

 

Les avantages matrimoniaux et le divorce

 

Exemple :

François Girard et Martine Albert sont mariés sous le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale de la communauté en faveur du survivant. La propriété de famille de l’époux est ainsi devenue un bien dépendant de la communauté. Le couple ne s’entend plu, envisage de divorcer et s’interroge sur le sort de son patrimoine en cas de divorce.

 

Lorsque la crise s’installe  au sein du couple et que la question du divorce est évoquée, les époux peuvent légitimement s’interroger sur le sort de leurs biens au regard de leur régime matrimonial. Lorsque celui-ci engendre des avantages matrimoniaux, comme en l’espèce, il faut savoir ce que le divorce emporte come conséquences.

 

Depuis le 1er janvier 2005, date d’entrée en vigueur de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce, le divorce est sans incidence sur les avantages matrimoniaux qui prennent effet au cours du mariage, mais emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux, sauf volonté contraire de l’époux qui les a consentis.

 

Les avantages matrimoniaux à effet différé. Les avantages matrimoniaux qui prennent effet à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux sont révoqués de plein droit par le divorce. Ce sont toutes les modalités de partage de la communauté et notamment la clause de partage inégal, la clause d’attribution intégrale de la communauté, et la clause de préciput.

 

Dès lors que le divorce est prononcé, cette catégorie d’avantage matrimonial disparaît purement et simplement.

 

Ainsi, la clause d’attribution intégrale de la communauté en faveur du survivant mise en place par les époux Girard sera révoquée par le divorce et la communauté fera l’objet d’un partage par moitié entre les époux.

 

Les avantages matrimoniaux à effet immédiat. En revanche, le divorce ne modifie pas la convention matrimoniale des époux en ce qui concerne les avantages matrimoniaux qui prennent effet au cours du mariage. Il s’agit notamment de l’adoption d’une communauté universelle ou à titre universel, de l’adoption d’une communauté conventionnelle, ou encore d’une stipulation de mise en communauté.

 

Ces avantages matrimoniaux sont donc maintenus nonobstant le divorce. En conséquence, l’entrée en communauté de la propriété de famille du mari ne sera aucunement remise en cause par le divorce et les époux procéderont au partage de leur communauté universelle qui comprendra cette propriété.

 

Il existe toutefois une solution afin d’éviter cela : prévenir au sein du contrat de mariage une clause de reprise en cas de divorce.

 

La clause de reprise en cas de divorce. Cette clause a été mise au point par le notariat d’Alsace-Moselle. Elle peut être utilisée dans le cadre de régimes de communauté universelle ou de communauté conventionnelle (Code civil, article 265 al.3). Elle permet un dénouement alternatif selon l’issue de l’union : en cas de dissolution de la communauté pour une autre cause que le décès, chacun des époux est en droit de reprendre les biens tombés en communauté de son chef (c’est-à-dire les biens qui seraient restés propres sous le régime de la communauté réduite aux acquêts); en cas de dissolution de la communauté par le décès de l’un des époux, les modalités particulières de partage de la communauté peuvent être stipulées, telle l’attribution intégrale de la communauté en faveur du survivant.

 

Si les époux Girard avaient prévu cette clause de reprise en cas de divorce dans le cadre de leur contrat de mariage, la propriété de famille aurait pu échapper au partage par moitié de la communauté à la suite de leur divorce.

 

Cette convention présente des intérêts incontestables. Elle permet aux époux de s’avantager et de se protéger mutuellement en cas de décès et ce en franchise de droits de mutation à titre gratuit et de ne partager entre eux qu’une communauté réduite aux acquêts en cas de divorce ou de séparation de corps. Cette convention est généralement adjointe au régime de la communauté universelle, mais son utilité existe dans d’autres communautés conventionnelles et même en cas de stipulation de mise en communauté à titre particulier.

 

 

 

Les frais à prévenir

 

Contrat de mariage

 

Les frais d’un contrat de mariage représentent une dépense peu importante, environ 400 €, en ce compris le droit d’enregistrement de 125 €. L’honoraire du notaire, dit plus exactement émolument, est égal à 182,50 €. Les différentes demandes de pièces et formalités sont rémunérées par des émoluments fixes d’environ une quinzaine d’euros. S’ils pensent à l’intérêt pratique que représente un tel acte à la durée de ses effets (pendant tout le mariage et à la dissolution), les futurs époux n’hésiteront pas.

 

Changement du régime matrimonial

 

Le changement de régime matrimonial au cours du mariage coûte un peu plus cher. L’émolument du notaire reste le même, mais les formalités sont plus importantes (notification aux enfants majeurs, publication dans un journal d’annonces légales), donc plus onéreuses. Seule consolation : lorsque les époux adoptent un régime de communauté ou modifient la communauté existant entre eux dans le but d’augmenter les droits du survivant, ils bénéficient d’une exonération fiscale. Ainsi s’il possèdent des biens immobiliers, ils ne devront pas payer la taxe de publicité foncière mais seulement le salaire du conservateur (0,10% de la valeur des immeubles).

 

Déclaration des biens

 

Il est souvent utile d’indiquer les biens dont les époux sont propriétaires, surtout s’il s’agit de biens mobiliers dont la preuve est difficile à faire ultérieurement. Un émolument revient alors au notaire à la place de l’honoraire fixe. Son taux est de 0,275 % hors taxes à partir de 30 000 €.

 

Déclaration des biens

 

 

 

Valeur des biens (€)

Taux (%) HT

Ajouter (€)

De 0 à 6 500

1,333

-

De 6 500 à 17 000

0,55

50,917

De 17 000 à 30 000

0,3667

82,083

Au-dessus

0,275

109,583

 

 

 

Il convient d'ajouter la TVA (19,60%).

 

 

Exemple de calcul

 

 

 

Supposons que les biens déclarés aient une valeur de 45 000 €.

 

 

 

L'émolument TTC relatif à la déclaration des biens est le suivant :

45 000 X 0,275 % soit

123,75 €

Ajouter, pour tenir compte des tranches inférieures

109,58 €

Total

 

233,33 €

 

 

 

Ajouter la TVA à 19,60 %.

 

 

 

 

Un choix réfléchi

 

Le choix d’un contrat de mariage nécessite un entretien préalable avec le notaire qui sera chargé de l’établir. Il interrogera les futurs époux sur leur situation familiale et patrimoniale, leurs projets d’avenir, la nature des activités professionnelles qu’ils exercent ou envisagent d’exercer. Éclairés sur les avantages et les inconvénients des différents régimes que la loi propose, sur l’intérêt des clauses particulières qui pourraient être prévues, les futurs époux feront le bon choix.

 

 

Source : Les mémos – Conseils des notaires

 

 

 

 

 

 

 


 

© 2008 Centre sino-français de Formation et d’Echanges notariaux et juridiques à Shanghai.

版权所有 2008 上海中法公证法律交流培训中心

沪ICP备17007739号-1 维护:睿煜科技